dimanche 10 mai 2020

Back to business...

Ce blog a été un peu délaissé ces dernières années...

Pourtant les événements économiques n'ont pas manqué ... mais le temps, si !

La crise sanitaire que nous traversons depuis le début de l'année, d'abord en Chine puis surtout en Europe et aux Etats-Unis, s'est muée en une crise économique sans précédent.

Ce n'est ni 2008, qui était une crise financière, et encore moins la crise de 1929 (dans les années 30, les taux d'intérêt avaient été augmentés pour punir les "vilains" spéculateurs). Les économistes ont quand même fait des progrès...

Les premières statistiques pour le début de l'année sont impressionnantes en termes de contraction du PIB, de montée du chômage (10 points en un mois en avril outre-Atlantique!). Le déconfinement (ne cherchez pas ce mot dans votre dictionnaire, il n'existe pas) va se traduite par un rebond tout aussi impressionnant de l'activité. Mais il ne faudra pas confondre la croissance (qui va obligatoirement être forte puisque dans certains cas, le chiffre d'affaires des entreprises a été quasiment nul pendant plusieurs semaines) et le niveau d'activité (en comparaison de ce qui prévalait avant-crise, fin 2019). Malheureusement cette crise va laisser des traces, en dépit des politiques économiques exceptionnelles mises en oeuvre par les gouvernements et les banques centrales.

Nous tenterons dans ce blog d'aborder le plus régulièrement possible les points saillants qu'il faudra surveiller dans une période qui va rester très complexe et agitée.

A bientôt

mardi 21 août 2012

Entre deux eaux

Les mois se suivent ... et se ressemblent, malheureusement.

Les incertitudes pesant sur l'avenir de la zone euro restent très nombreuses. Certains évoquent même un éclatement probable, sans réfléchir sans doute suffisamment aux difficultés qui surgiraient alors. Aux Etats-Unis, en cette veillée d'arme électorale, la reprise est bien pâle. Même la Chine semble donner des signes d'affaiblissement. En France, les prévisions pour 2013 sont revues à la baisse.

La vérité est que la crise que nous vivons est d'une triple nature :

- D'une part, une crise de l'endettement : d'abord privée, celle-ci est devenue publique. Tous les acteurs économiques, dans quasiment tous les pays du monde, cherchent à se désendetter en même temps. focément cela devient déflationniste. Le désendetteemnt est en cours mais il prendra du temps.

- Une crise de modèle : derrière cette phase de suraccumulation à crédit,  viens inévitablement le besoin de trouver les relais d'une croissance plus équilibrée, ne s'appuyant pas sur une bulle de crédit. Le rôle du secteur financier dans le développement économique est revisité. Les secteurs moteurs des années 2000 (construction, industrie financière) doivent laisser place à d'autres sources de développement.

- Une crise plus structurelle, impliquant une phase de transition : contraintes démographiques en Europe, Arrivée de la Chine à maturité sur certains aspects, conduisant sans doute à une période croissance moindre, en tout cas inférieure aux 10 % l'an observés depuis longtemps.

Cela signifie que la croissance n'est sans doute pas au coin de la rue. Les implications à tirer sont de deux ordres :

- à court terme, les politqiues récessives peuvent être inappropriées et entretenir la crise. Naturellement, cela ne veut pas dire qu'il ne faille pas assainir les finances publiques.

- les défis posés aux autorités sont de très grande ampleur. Il s'agit notamment de mettre en oeuvre des politiques publiques, peu coûteuses mais suscpetibles de soutenir la croissance à moyen terme.

Un défi, disais-je ....

vendredi 23 décembre 2011

Bon anniversaire ... Monsieur euro !

L'euro a dix ans ! 10 ans ... ce sont les noces d'étain ! Pour les 10 ans de mariage, le compte est rond, on passe aux choses sérieuses avec un matériau métallique solide ! A l'état brut ou pièce d'orfèvrerie des Etains du Prince, il vous portera bonheur pour les 10 années à venir (extrait d'anniversairedemariage.com). Pas sûr que les autorités européennes fêtent en grande pompe cet anniversaire. Dans le contexte actuel, la discrétion est de rigueur ! Car l'euro est clairement en danger. Ici ou là les esprits commencent à envisager un éclatement de la zone, à travers divers scénarios. Après le mariage ... le divorce ! Mais celui-ci serait très douloureux : moralement (cela signifierait un coup d'arrêt peut être fatal à la construction européenne) ; financièrement (au moins pour un temps, cela ne ferait que tirer les économies européennes vers le bas).

De toute évidence, l'Europe s'est tirée une balle dans le pied ces derniers mois. Certes la croissance économique mondiale s'est affaiblie en 2011, mais la zone euro sera seule à connaître la récession. Pourtant, il est bon de le rappeler, les déficits publics au niveau de l'ensemble de la zone sont bien moindres qu'outre-Atlantique et la balance commerciale est à l'équilibre. En outre, la dette publique est détenue au moins aux trois-quarts en interne (encore une fois si l'on considère l'ensemble de la zone). L'éco-système "zone euro" est donc viable : il faut par contre un rééquilibrage au sein de la zone. Or, toutes les décisions prises jusqu'ici se focalisent sur une chose : réduire le plus rapidement possible les déséquilibres publics. Cela ne peut conduire qu'à une récession. Cet attitude contraste avec celle des autorités américaines qui se focalisent d'abord sur la croissance. Il n'est pas question ici de contester la nécessité de rééquilibrer les comptes publics. Mais il fallait donner du temps eu temps (comme nous le disions déjà en juillet !). En voulant faire vite, les gouvernements européens se sont décridibilisés auprès des marchés qui leur ont dit : "si vous mettez des plans d'ajustement en oeuvre aussi rapidement, la croissance s'affaiblira et vous n'atteindrez pas vos objectifs budgétaires". Ce à quoi les gouvernements européens ont répondu par toujours plus de rigueur budgétaire ...

La réponse européenne de la crise qui s'est amorcée en 2008 aurait dû s'appuyer sur quatre piliers :

- un rééquilibrage graduel et coordonné des comptes publics : un calendrier crédible de rééquilibrage des comptes publics sur une période longue de 5 à 7 ans selon la situation initiale et coordonné au niveau de l'ensemble de la zone. Pour l'ensemble de la zone, l'ajustement structurel aurait dû être d'environ un point de PIB par an (il a été double en 2011), ce qui aurait permis de ramener les comptes à l'équilibre à un horizon de 5 ans pour l'ensemble de la zone. Le chemin aurait dû être plus pentu pour les pays à forts déséquilibres ... mais aussi plus doux pour ceux qui bénéficiaient d'une situation budgétaire meilleure. L'annonce de ce plan aurait dû être commune et non se faire de façon dispersée.

- un soutien aux économies en difficulté : parallèlement, des mesures de soutien à l'économie auraient dû être annoncées au niveau de l'ensemble de la zone : au niveau agrégé, celles-ci auraient dû être neutres, mais elles auraient favorisé les pays où l'ajustement budgétaire aurait été le plus sévère. Par exemple sous la forme d'emprunts garantis par un système du type FESF ou via la Banque européenne d'investissement ou encore sous la forme d'un élargissement des fonds structurels destinés à renforcer le potentiel de croissance et la convergence des économies périphériques.

- un programme de convergence fiscale : une marche vers une harmonisation de la fiscalité entre les pays membres auraient dû être annoncée pour les grands impôts pouvant donner lieu à des distorsions économiques (impôt sur les sociétés, impôt sur le revenu, cotisations sociales). Un programme sur cinq ans aurait dû être défini pour amener les pays vers des taux compris dans une fourchette étroite, à la lumière des critères de convergence adoptés à la naissance de l'euro.

- une adaptation du traité de Maastricht : la croissance nominale de la zone euro à long terme sera sans doute proche de 3,5% (et non 5%), recouvrant une hausse du PIB réel de 1,5 % et 2 % de hausse des prix. Cela signifie que l'on peut admettre une dette de 50 % du PIB (et non 60 %) et un déficit inférieur à 1,75 % du PIB (et non 3%), pour une dynamique soutenable de la dette. La règle d'or n'est pas forcément nécessaire. Enfin, il faudrait compléter les critères en incluant notamment les déséquilibres extérieurs (l'Espagne et l'Irlande dégageaient un excédent public) et sans doute des critères de surveillance financière (notamment le prix des actifs). Il faudrait réfléchir aussi à la symétrie du traité : un excédent commercial pléthorique est signe d'un excès d'épargne ; lorsque la croissance est forte, il faudrait contraindre les pays à dégager un excédent budgétaire.

Faute de telles décisions, l'avenir de la zone euro est aujourd'hui très incertain. Mais il n'est pas forcément trop tard. Il faut absolument adopter une vision dynamique et non pas accentuer la seule peur du gendarme !!!






vendredi 29 juillet 2011

L'euro en danger : donner du temps au temps !

Depuis plus d'un an maintenant, la crise de la dette souveraine européenne fait la une de l'actualité. Devant ce feuilleton quasi-quotidien où les prises de position les plus fermes sont parfois démenties le mois suivant, il n'est pas inutile de rappeler quelques points clefs :

1. L'euro est un choix politique. Sa défense l'est aussi. Une grande partie des turbulences actuelles provient du fait que les dirigeants européens répondent de leurs actes devant leurs propres citoyens et non devant l'ensemble des citoyens européens. La position de Mme Merkel est donc sous l'influence des intérêts nationaux. Cette dernière aurait probablement une position différente si les électeurs grecs pouvaient influer sur sa destinée ! Cela explique que les positons nationales soient parfois divergentes ou, qu'en termes de théorie des jeux, ce ne soit qu'en cas de crise extrême que les choses avancent (parce ce qu’une catastrophe en Grèce peut avoir un impact en Allemagne pour poursuivre notre exemple)

2. Les déséquilibres commerciaux des pays européens sont largement intra-européens. Autrement dit l'excédent commercial allemand n'est que le symétrique des déficits des pays du Sud. Pour que ces derniers rééquilibrent leurs économies (et ils en ont besoin), le premier marché européen doit repartir. Autrement dit les Allemands doivent consommer. Mais les tendances démographiques vont à l'encontre de ce mouvement. Alors il faudra accepter des transferts des pays excédentaires vers les pays déficitaires (finalement c'est un peu ce qui se passe aujourd'hui). Il faut placer le curseur de la vertu au bon niveau. Certes, tous les pays européens doivent faire des efforts pour rester compétitifs (éviter les dérapages des coûts salariaux, faire des efforts de recherche et développement pour monter en gamme et ne pas prendre de face la concurrence des pays émergents, etc.). Mais il ne faut pas transférer une guerre larvée du change – chose impossible en union monétaire- vers une guerre des coûts, qui ne peut être que déflationniste !

3. La construction européenne a voulu favoriser une convergence des niveaux de vie entre les pays (par le haut bien sûr). Cela explique en partie les différentiels d'inflation et de coûts entre les pays membres, qui sont devenus difficilement supportables avec une monnaie unique. Il faut poursuivre ce processus de convergence, encore une fois cela veut dire favoriser la croissance là où le niveau de vie est faible, à travers par exemple les fonds structurels.

4. On peut montrer que, sous réserve d'une certaine rigueur, les déséquilibres de certains pays peuvent être résorbés. Mais pas en un an ou deux, sinon les politiques restrictives tueront la croissance et rien ne sera résolu. Cela nécessite une bonne dizaine d’années. De ce point de vue, les décisions européennes vont dans le bon sens.

5. Le principal danger est un effet de contagion, touchant l’Espagne et l’Italie, et pourquoi pas d’autres pays. Il faut bien voir que ce risque est né en partie des atermoiements européens, en partie pour les raisons de stratégie politique évoquée plus haut. Espérons qu’il ne soit pas trop tard !

La crise grecque est parfois perçue comme la fin de l’euro. Au contraire, elle devrait être perçue comme le début d’une nouvelle ère européenne, basée sur une autre gouvernance (coordination des politiques économiques, soutien mutuel, transferts structurels renforcés, etc.), renforçant l’idée d’un marché unique avec une monnaie unique. La solution n’est pas dans l’éclatement de l’euro (en 2, 3 ou 4 zones …). Certains évoquent la création d’un euro du Nord (avec l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Autriche) et un euro du Sud (avec la France, l’Italie, l’Espagne, le Portugal). Mais les cas de ces quatre pays sont complètement différents. On s’en apercevrait vite et la zone Sud devrait encore être redivisée (Nord-Sud et Sud-Sud ???).

Le seule vraie stratégie est celle du long terme avec les pistes évoquées ci-dessus, en s’appuyant sur un véritable engament politique dès maintenant. Faute de quoi tout peut arriver, même si « le pire n’est jamais certain », surtout en ce qui concerne la construction européenne…

mercredi 13 avril 2011

Vive l'industrie ... oui, mais quelle industrie ?

Depuis quelque temps, l'industrie a le vent en poupe. En France, vient de se dérouler une semaine de l'industrie, destinée à promouvoir ces secteurs d'activité. L'ère du "brick and mortar" était sensée être révolue au profit des nouvelles technologies, accentuant encore la tertiarisation de l'économie. Les Etats-Unis voyaient leur croissance s'accélérer grâce aux gains de productivité réalisés non pas dans l'industrie, mais dans la nouvelle économie, la finance et le commerce. Mais le vent a tourné. La crise financière est passé par là, jetant un trouble sur les performances "réelles" de la sphère financière. L'éclatement de la bulle immobilière, pas seulement outre-Atlantique, mais aussi au Royaume-uni, en Irlande ou en Espagne a montré que la dynamique de la construction a aussi ses limites comme soutien à la croissance. Portée par le développement des pays émergents, avide de biens de consommation et d'équipement, l'industrie a retrouvé une légitimité qui semblait perdue. Faire de lance de l'industrie européenne, l'Allemagne est ainsi aujourd'hui couverte de louanges pour ces performances économiques. Au contraire, la France se trouve un peu à la peine. Selon certains observateurs, le faible poids du secteur industriel dans l'économie hexagonale ( autour de 10 % pour les activités manufacturières en France, presque le double en Allemagne) serait un lourd handicap, à l'origine de ce décalage franco-allemand. Mais encore faut-il savoir de quoi parle-t-on. D'abord, nombre d'entreprises industrielles ont externalisé une partie des fonctions tertiaires (développement des activités d'intérim comptabilisées dans les services aux entreprises et non dans le secteur utilisateur, le nettoyage, une partie de la comptabilité, de la communication, etc.). Ceci affecte la lecture des effectifs employés par secteur d'activité. Il est clair ainsi qu'une grande partie des personnes employées dans les services aux entreprises travaillent en fait pour des entreprises industrielles. Deuxièmement, la vision de l'industrie que l'on peut avoir aujourd'hui doit intégrer une réflexion sur la chaîne de valeur. La valeur ajoutée naît surtout de la conception des produits, de leur distribution et moins de leur fabrication stricto sensu. L'i-phone d'Apple n'est pas fabriqué aux Etats-Unis. Par contre, le développement de ce produit a généré des profits importants pour Apple, avec in fine des retombées positives pour l'économie américaine. Troisièmement, même pour les entreprises engagées dans la fabrication de produits industriels, les services apportés associés à ces produits, par exemple en matière de maintenance ou de formation, peuvent se révéler cruciaux, à la fois en termes de contribution au chiffre d'affaires et de valeur ajoutée, tout en étant discriminants sur le plan de al compétitivité. Dans une enquête de 2005 menée par le Ministère de l'industrie, 28 % des entreprises industrielles déclaraient fournir des services à leurs clients (33 % des entreprises de plus de 250 salariés). Dans ce contexte, pour les "vieilles" nations, il est sans doute nécessaire de repenser la stratégie industrielle. Face à la concurrence des pays à bas salaires, qui est appelée à durer, c'est sur le positionnement dans la chaîne de valeur que doit porter la réflexion. Il n'est donc pas incompatible d'avoir un peu moins d'usines, tout en se donnant comme objectif de préserver une industrie capable d'innover et créatrice de valeur. Naturellement, cela pose de multiples questions en matière politique économique, en particulier en ce qui concerne l'emploi. Dans un pays comme la France, l'emploi peu qualifié est sans doute appelé plutôt à se développer dans le tertiaire plutôt que dans l'industrie. Au fur et à mesure que les activités se recentrent sur les fonctions tertiaires dans les entreprises industrielles (c'est-à-dire en dehors de la fabrication pure et dure), ce sont les emplois qualifiés (ingénieurs, techniciens de maintenance) qui vont prendre de l'ampleur. Il faut donc repenser l'industrie, plutôt que vouloir s'arc-bouter sur des schémas anciens et datés. C'est à ce prix que les activités industrielles peuvent encore contribuer à la croissance des pays développés.

mardi 13 juillet 2010

Comment positionner le curseur concernant la consolidation budgétaire ?

Conséquence de la crise, dans quasiment tous les pays, les déficits publics se sont creusés de manière très importante. N'oublions pas qu'il s'agit dans la plupart des cas du résultat d'une démarche volontaire, en vue de soutenir l'activité économique lorsque la demande privée s'était évaporée. On ne doit pas s'étonner que, face à une crise d'une ampleur exceptionnelle, les déficits publics se soient creusés, eux aussi, d'une manière exceptionnelle. Cela tient à deux éléments : d'une part, une perte de recettes (moindres rentrées de TVA, de l'impôt sur les sociétés ...) et un surcroît de dépenses (hausse des prestations chômage) en lien direct avec le creux conjoncturel ; d'autre part, des mesures discrétionnaires de soutien à l'activité (par exemple, la prime à la casse en France). Dans la zone euro, les effets conjoncturels ont contribué à un creusement du déficit de 2,5 points de PIB entre 2008 et 2010 et les mesures directes à 2 points supplémentaires. Pour la France, les chiffres correspondant sont de 1,7 point et de 3 points.


Le redressement de la conjoncture devrait aidée à restaurer les finances publiques. Mais si la croissance demeure modeste, il est à craindre que ce mouvement soit lent. Des mesures de consolidation budgétaire sont donc nécessaires. Se pose alors la question du timing. Les prendre trop tôt pourrait freiner voire empêcher la reprise ; les prendre trop tard pourrait conduire à l'enclenchement d'une spirale de la dette.

On veut ici proposer une règle simple, de bon sens, qui pourrait aider à concilier consolidation budgétaire et maintien de la croissance. Après la phase de relance, qui implique la mise en oeuvre de mesures discrétionnaires, une première étape consiste à laisser jouer les stabilisateurs automatiques. Autrement dit, l'activité redémarrant, les rentrées fiscales s'accroissent automatiquement. Mais ce processus peut être trop lent. Il convient alors d'attendre que la croissance soit revenue à son rythme potentiel pour prendre des mesures ad hoc, qui seront alors le symétrique des mesures discrétionnaires prises lorsque la croissance est passée sous son potentiel. Naturellement, d'un point de vue pratique, ces mesures peuvent être décidées de manière anticipée en fonction des prévisions macroéconomiques. Ce processus doit aussi tenir compte des anticipations des agents économiques. On peut objecter qu'on ne connaît pas très bien le potentiel de croissance des économies matures après cette crise exceptionnelle. Mais on peut se montrer raisonnable en suggérant par exemple que la croissance potentielle se situe peut être un peu en deçà de celle estimée avant-crise.

Il est donc possible de réduire les déficits publics sans trop obérer la croissance. Mais cela nécessite un pilotage de haute précision de la politique budgétaire.

vendredi 30 avril 2010

Euro : attention à ne pas tirer des conclusions erronées de la crise grecque

Les difficultés grecques, et les tensions de financement pour d'autres pays dits du Sud, ont conduit certains analystes à s'interroger sur la pertinence de maintenir la zone euro en l'état. L'idée sous-jacente est que ces pays en difficulté pourraient retrouver des marges de manoeuvre en renouant avec une monnaie nationale et en la dévaluant contre l'euro.

Il faut en fait dire haut et fort que si la zone euro éclatait, les dommages économiques et sociaux pour les pays membres seraient considérables.

D'une part, d'un point de vue technique, la mise en oeuvre d'une autre monnaie ne peut se faire du jour au lendemain. La question de la sortie de la zone euro n'est pas du tout symétrique à la question de l'entrée. Les coûts ne sont pas les mêmes. Quelle serait alors l'attitude des marchés devant ce flot d'incertitude ? Par ailleurs, même si les pays sortant de la zone euro pouvaient dévaluer, le montant de leur dette exploserait puisque leurs principaux bailleurs sont dans la zone euro. Les banques centrales de ces pays seraient aussi contraintes d'augmenter très fortement leurs taux, ce qui étoufferait la demande interne. Pour les pays qui resteraient dans la zone, dont l'Allemagne, il en résulterait aussi probablement des tensions sur les taux et une perte de débouchés en raison de la récession qui toucherait les pays sortant. Les banques de ces pays seraient aussi fragilisées par une éventuelle dépréciation de leurs créances sur les pays sortants.

Il est donc incontournable pour les pays membres de se montrer solidaires. Cependant, cette solidarité ne peut être inscrite dans les textes, puisque cela équivaudrait à créer un aléas moral important : pourquoi être rigoureux si je suis sûr que mes voisins vont payer pour moi ? Le pragmatisme doit prévaloir.

Et c'est bien ce qui se passe depuis un an et demi. Les pays de la zone euro n'ont pas hésité à mettre entre parenthèses, pour un temps, les critères de Maastricht, lorsque la crise était prégnante. De même, si rien n'était prévu pour une situation de ce type à l'origine, avec du temps et non sans difficulté, les pays membres ont réussi à se mettre d'accord pour sauver la Grèce du défaut de paiement, tout au moins à l'heure où est écrit ce billet.

De fait, l'Europe est un objet original. Il ne s'agit pas d'un état fédéral, et les pays membres gardent leur indépendance. Les gouvernements répondent d'ailleurs à leurs ressortissants et non à tous les européens. Mais aucune zone géographique au monde n'est aussi avancée en termes de coopération économique, voire politique (comme l'a montré l'abandon de la souveraineté monétaire, qui est aussi un geste politique très fort).

Il en va ainsi de la construction européenne. Sa trajectoire n'est pas rectiligne, loin s'en faut. Elle avance plutôt en crabe ! Mais elle avance quand même ...