vendredi 29 juillet 2011

L'euro en danger : donner du temps au temps !

Depuis plus d'un an maintenant, la crise de la dette souveraine européenne fait la une de l'actualité. Devant ce feuilleton quasi-quotidien où les prises de position les plus fermes sont parfois démenties le mois suivant, il n'est pas inutile de rappeler quelques points clefs :

1. L'euro est un choix politique. Sa défense l'est aussi. Une grande partie des turbulences actuelles provient du fait que les dirigeants européens répondent de leurs actes devant leurs propres citoyens et non devant l'ensemble des citoyens européens. La position de Mme Merkel est donc sous l'influence des intérêts nationaux. Cette dernière aurait probablement une position différente si les électeurs grecs pouvaient influer sur sa destinée ! Cela explique que les positons nationales soient parfois divergentes ou, qu'en termes de théorie des jeux, ce ne soit qu'en cas de crise extrême que les choses avancent (parce ce qu’une catastrophe en Grèce peut avoir un impact en Allemagne pour poursuivre notre exemple)

2. Les déséquilibres commerciaux des pays européens sont largement intra-européens. Autrement dit l'excédent commercial allemand n'est que le symétrique des déficits des pays du Sud. Pour que ces derniers rééquilibrent leurs économies (et ils en ont besoin), le premier marché européen doit repartir. Autrement dit les Allemands doivent consommer. Mais les tendances démographiques vont à l'encontre de ce mouvement. Alors il faudra accepter des transferts des pays excédentaires vers les pays déficitaires (finalement c'est un peu ce qui se passe aujourd'hui). Il faut placer le curseur de la vertu au bon niveau. Certes, tous les pays européens doivent faire des efforts pour rester compétitifs (éviter les dérapages des coûts salariaux, faire des efforts de recherche et développement pour monter en gamme et ne pas prendre de face la concurrence des pays émergents, etc.). Mais il ne faut pas transférer une guerre larvée du change – chose impossible en union monétaire- vers une guerre des coûts, qui ne peut être que déflationniste !

3. La construction européenne a voulu favoriser une convergence des niveaux de vie entre les pays (par le haut bien sûr). Cela explique en partie les différentiels d'inflation et de coûts entre les pays membres, qui sont devenus difficilement supportables avec une monnaie unique. Il faut poursuivre ce processus de convergence, encore une fois cela veut dire favoriser la croissance là où le niveau de vie est faible, à travers par exemple les fonds structurels.

4. On peut montrer que, sous réserve d'une certaine rigueur, les déséquilibres de certains pays peuvent être résorbés. Mais pas en un an ou deux, sinon les politiques restrictives tueront la croissance et rien ne sera résolu. Cela nécessite une bonne dizaine d’années. De ce point de vue, les décisions européennes vont dans le bon sens.

5. Le principal danger est un effet de contagion, touchant l’Espagne et l’Italie, et pourquoi pas d’autres pays. Il faut bien voir que ce risque est né en partie des atermoiements européens, en partie pour les raisons de stratégie politique évoquée plus haut. Espérons qu’il ne soit pas trop tard !

La crise grecque est parfois perçue comme la fin de l’euro. Au contraire, elle devrait être perçue comme le début d’une nouvelle ère européenne, basée sur une autre gouvernance (coordination des politiques économiques, soutien mutuel, transferts structurels renforcés, etc.), renforçant l’idée d’un marché unique avec une monnaie unique. La solution n’est pas dans l’éclatement de l’euro (en 2, 3 ou 4 zones …). Certains évoquent la création d’un euro du Nord (avec l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Autriche) et un euro du Sud (avec la France, l’Italie, l’Espagne, le Portugal). Mais les cas de ces quatre pays sont complètement différents. On s’en apercevrait vite et la zone Sud devrait encore être redivisée (Nord-Sud et Sud-Sud ???).

Le seule vraie stratégie est celle du long terme avec les pistes évoquées ci-dessus, en s’appuyant sur un véritable engament politique dès maintenant. Faute de quoi tout peut arriver, même si « le pire n’est jamais certain », surtout en ce qui concerne la construction européenne…

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