vendredi 20 novembre 2009

Banques : comment introduire du normatif ?

Depuis le deuxième trimestre 2009, les banques ont renoué avec les profits. La presse nous apprend même que certaines d'entre elles auraient commencé à redistribuer des bonus à leurs traders. Faut-il s'offusquer de ce redressement, parfois spectaculaire, alors que la puisance publique avait été appelée à la rescousse pour éviter une implosion du système bancaire il y a moins d'un an ?

Première observation, les banques restent des entreprises comme les autres, au moins pour celles qui sont dans la sphère privée. Elles doivent dégager des profits, pour rémunérer leurs actionnaires bien sûr, mais aussi pour assurer leur développement et leur pérennité. Mais là n'est pas le coeur de la discussion.

Concernant les bonus, il est clair que les sommes mirobolantes parfois annoncées peuvent apparaître comme une injustice. Mais après tout, les bonus sont une forme extrême de participation des salariés aux profits de leur entreprise, un système que les autorités ont depuis longtemps tenté de favoriser. Alors, pourquoi ce malaise ? En fait, il provient de deux éléments fortement imbriqués. Tout d'abord, ces bonus sont obtenus en prenant des risques importants. L'appât aux gains peut dès lors inciter les traders à prendre de plus en plus de risques, débouchant sur un réel danger pour la banque qui les emploie. Et là intervient un second élément : il n'y a pas symétrie dans la prise de risque, puisque ce ne sera pas le trader qui enregistrera les pertes éventuelles, mais son employeur.

Mais la banque, ce n'est pas seulement les traders et les bonus. Certains suggèrent ainsi que les activités des banques soient de nouveau séparées entre activités de détail (gestion des comptes courants, crédits) et activités d'investissement et de gestion d'actif. Ce faisant, les pertes enregistrées sur les marchés ne viendraient pas contaminer la distribution de crédit, avec toutes ses implications sur l'économie. Ce serait un retour en arrière par rapport au passé, mais cela serait une façon de tirer les leçons de la crise.

En fait, le problème est plus complexe qu'il n'y paraît. Tout d'abord, une large partie des activités financières apporte une fluidité à l'économie. Un exportateur qui vend des marchandises à trois mois est bien content de pouvoir connaître d'ores et déjà ses recettes en pratiquant une couverture de change. En outre, certaines activités de la banque d'investissement (conseil lors d'une fusion par exemple) ne pose pas problème. Ce sont les activités de trading pour compte propre qui sont source de risque systémique. C'est donc sur elles que devrait porter un net resserrement de la réglementation.

En résumé, on a pu avoir l'impression que les banques pratiquaient une "socialisation des pertes" après avoir bénéficié d'une "privatisation des profits". Mais introduire du normatif dans la gestion des banques nécessite une réflexion plus précise sur leurs vrais métiers, et sur ce qu'elles peuvent apporter à la collectivité. Isoler les activités purement spéculatives serait une bonne façon de concilier le "normatif social" en conservant l'efficacité économqiue.